De l’organique aux bioplastiques

La place des micro-organismes dans la création de bioplastiques : entretien avec Mme Hernandez-Raquet

Les polyhydroxyalcanoates ou PHAs sont créés naturellement par une palette de bactéries qui les utilisent comme réserve d’énergie en périodes de pénurie. En conditions d’opulence en sources carbonées et de nutriments (azote,soufre, oxygène, phosphore…) les Pseudomonas, Azotobacters, Hydrogenomonas et autres Chromatium peuvent synthétiser près de 150 polymères différents comme source d’énergie stockée. Parmi ces polymères, les PHAs présentent des propriétés thermoplastiques intéressantes et sont totalement biodégradables. Ainsi, la production des PHAs représente une alternative intéressante aux plastiques d’origine fossile et une piste de valorisation de déchets organiques de l’agriculture et l’agroalimentaire.

Une population productive, un environnement déterminant pour la qualité de cette production, des enjeux sociétaux, ce sont les coeurs des préoccupations scientifiques de Mme Guillermina Hernandez-Raquet, directrice de Recherches INRA du LISBP - INSA qui nous a accordé un entretien.

Une affaire de curseurs

La typologie des bactéries impliquées dans la production de PHAs, les conditions du milieu extérieur qui favoriseront cette production regroupent un nombre important de combinaisons qui nécessitent une approche d’étude raisonnée et systématique.

A ce stade, Mme Emilie Alaux, doctorante au laboratoire, étudie les conditions de fermentation qui permettent la sélectionne des souches de micro-organismes producteurs de PHAs dans l’objectif d’identifier les meilleurs productivités possibles. L’approche empirique est confortée par près de cinquante ans de recherche dans le secteur qui offrent une littérature et une expérience permettant d’identifier les conditions et les microorganismes les mieux adaptés à la transformation de déchets agricoles et alimentaires pour leur valorisation via la production de PHAs.

Pensée extracellulaire

Le projet BIOPLAST s’ancre sur les territoires transfrontaliers Espagne- France - Andorre et travail à l’élaboration de solutions pour les producteurs locaux, en circuit court. Les recherches menées doivent pouvoir s’appliquer sur le terrain et permettre d’offrir des solutions rentables économiquement et réalistes techniquement.

La science s’adapte avec une visée concrète, permettre la création de bassins de transformation. Pour ce faire, la stratégie de recherche intègre des paramètres industriels dans son équation : les conditions de fermentation, les substrats disponibles à des coûts raisonnables, et la sélection de microorganismes exploitables producteurs de PHA.

Des résidus pour les matériaux

Le projet s’attache à valoriser les déchets agricoles. L’orientation n’est pas neutre aussi au niveau scientifique. Elle représente un enjeu significatif pour l’identification de nouvelles sources d’approvisionnement en substrats pour la biosynthèse de bioplastiques.

Si le fonctionnement des bactéries a pu être étudié, leur comportement face à de nouveaux matériaux qui serviront comme substrat pour les microorganismes, surtout dans une optique industrielle, laisse de nombreuses pistes de recherche. Le LISBP teste de nouvelles ressources prometteuses issues de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Elles pourraient assurer à la fois une productivité industrielle mais aussi une source de revenus pour les producteurs souhaitant les valoriser. Le coût se transforme en revenus, les résidus en matériaux.

Dans la nébuleuse des expériences, des tris, sélections et observations apparaissent les premiers résultats. Nous aurons l’occasion d’y revenir dans les prochains mois.